La banane de la discorde

Imaginez : deux hommes enfermés deux jours durant, essayant de ne pas sombrer dans les limbes du sommeil profond, acharnés, grognant, suant, ne pouvant cesser d’abattre un travail monstre en un temps limité.

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Monkibe et moi-même, tels que nous étions durant ces 25 heures. Enfin en vrai, Monkibe est plus petit.

Non, ce n’est pas un remake de Nuit et Brouillard mais bel et bien l’événement dédié aux dessineux du web : les 25 heures de la BD. Soit un défi organisé sur le net par Goliver et Zia (qui se coltinent aussi l’organisation des 23 heures de la BD chaque année, mais ils aiment souffrir). Tout cela s’est déroulé ces samedi et dimanche 29 et 30 octobre.

En quoi consiste le défi ? Simple :
– 12 planches de BD à réaliser
– Un temps limite de 25 heures (de 13h le samedi à 13h le dimanche, soit 24h + 1h à cause du passage à l’heure d’hiver).
– Un thème à respecter : Yokaï
– Une contrainte : un élément de la BD doit être à l’envers.

Comme depuis désormais deux ans, j’ai rejoint l’ami Monkibe pour participer à cette folle aventure dans la joie et l’allégresse les plus totales. Cela donne des œuvres plutôt improbables en général, en attestent notre participation aux 23 heures de la BD 2015 ou encore notre BD commune de l’édition 2016. Ces 25 heures n’ont pas dérogé à la règle.

Si vous souhaitez simplement lire la BD, je vous conseille de suivre ce magnifique lien bleu souligné qui se transformera en magnifique lien violet souligné une fois que vous aurez cliqué dessus.
Pour les autres, voici le récit de ces 25 heures (avec suppléments photos / vidéos / chaton).

Après avoir débarqué dans la capitale française et lutté contre la faune locale composée de passagers de métros sauvages, automobilistes hargneux et autres vendeurs de tapis insistants, j’ai rejoint l’indéfectible Monkibe directement dans sa demeure afin d’en découdre avec ces 25 heures de gribouille à venir.
À 8h30, ce samedi 29 octobre, je me réveille et la journée se lance.

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Conversation par texto entre Bambou, amie gribouilleuse et Monkibe qui tente en vain de lui expliquer le principe des 25 heures de la BD. C’est authentique.

9h00
Monkibe se chausse et s’apprête à quitter l’appartement.
« Je vais chercher l’ordinateur à une heure de route d’ici, pas de souci, tout va bien !
– Effectivement, ce sera mieux pour scanner et mettre en ligne la BD avec un ordinateur, acquiesce-je.
– Je serai de retour à midi grand maximum !
– Très bien. Une heure avant l’annonce du thème, c’est parfait. À tout à l’heure. »

10h00
Faute d’occupation, je gribouille un peu pour m’échauffer et fais connaissance avec le second habitant des lieux : un chat. Ragnarok de son prénom. Ou Rag.
Il faut savoir que j’exècre cette espèce sans foi ni loi constituée par les chats. Les chats doivent être éliminés. Brûlés vifs. Parqués dans une cave avec du Maître Gims le son à fond.
Mais je n’ai pas le choix ici, alors j’endure.

12h00
Je reçois un message de Monkibe : « J’aurai du retard ». Tout va bien, il y a de la marge.

13h00
C’est l’heure de l’annonce du thème. Monkibe n’est toujours pas là. Je décide d’aller sur le site des 25hBD avec mon smartphone captant le réseau à peu près aussi bien qu’un minitel branché sur une centrale vapeur. Miracle, ça fonctionne ! La page internet charge, le thème va apparaître et… L’écran change brutalement d’image, c’est Monkibe qui m’appelle. « Allô, éructe-je d’un ton aussi enjoué qu’un raton-laveur sous un pneu.
– Alors Poulop ? C’est quoi le thème ?
– ESPÈCE D’ENFANT DE MOINEAU CONFIT ! SI TU ATTENDAIS DEUX SECONDES JE POURRAIS REGARDER SUR MON TÉLÉPHONE ! RÉSIDU DE SAC PLASTIQUE PICORÉ MAL DIGÉRÉ !
– Allô ? Poulop ? Je capte pas bien, tu peux répéter ?
– Je regarde le thème et je te rappelle, cher Monkibe.
– Ça marche !

13h05
Je découvre le thème : Yokaï. Après une rapide recherche wikipédia précédée de vociférations du style « argnfrogntudjgrmblouarf qu’est-ce que c’est que ce truc ? », j’apprends que le Yokaï est une sorte d’esprit / fantôme / Jean-Pierre Chevènement du folklore japonais.
Puis vient la contrainte : un élément de la BD devra être à l’envers. Un personnage, une vignette, toute la BD, peu importe.

13h10
Un texto de Monkibe fait retentir mon téléphone : il aura une heure de retard. Quelques injures en Patois ancien m’aident à patienter.

14h00
Monkibe arrive enfin, nous filons dans l’épicerie équitable locale (Super U, donc) pour nous approvisionner en fruits, légumes et aliments bios à base de graines trucs gras.

15h00
Nous sommes enfin posés, disponibles et commençons à réfléchir à ce qu’on va bien pouvoir gribouiller comme BD. un dialogue s’ensuit :
« Dis Monkibe, j’ai une idée. On pourrait mettre en scène deux fantômes qui se disputent pour savoir qui va aller faire peur à un mec chez lui ?
– Mmmmh… Ou un combat méga épique entre un Yokaï et un autre mec ?
– Ah ouais pas mal ! Pourquoi ils se battent du coup ?
– Euh… Une banane ?
– Génial ! On fait ça !

17h00
Nous réalisons que 4 heures se  sont déjà écoulées et nous n’avons encore rien commencé en termes de dessin.

17h30
Le découpage de la BD est prêt, nous partons pour 15 planches, il n’y a plus qu’à gribouiller !

Jusqu’à 4h du matin s’enchaînent discussions proverbiales à base de jeux de mots scandaleux, de plaisanteries honteuses et de vannes méritant la peine de mort. Divers trucs à grignoter, boissons et plats aussi sains qu’une émission de Cyril Hanouna se succèdent. Vers 4 heures, nous tombons l’un et l’autre : il est temps de faire une sieste avant de continuer.

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Un gribouillis réalisé après l’épreuve des 25 heures de la BD, avant de retourner dans mes contrées bordelaises.

Réveil à 7h pour ma part. Monkibe, lui, est déjà en train de se réactiver. Le teint aussi frais que Jeanne Moreau, nous persévérons jusqu’à 11h30, heure à laquelle les derniers coups de crayon / stylos feutres / cravache sont effectués. Nous nous attelons alors au gommage, au scannage des planches et à leur mise en ligne.

C’est alors tout un fatras de froissements de feuilles, de mélanges de numéros de page, de connexion internet instable, de formats incompatibles, de poids de fichier inadapté et de chaton insupportable qui s’abat sur nos trognes défaites par le manque de sommeil.

Mais après maints efforts, encouragements mutuels et jurons slovaques par dizaines, nous avons finalement réussi à boucler le tout en bonne et due forme.

Vous êtes encore là ? Vous n’avez que ça à faire, lire ces âneries ? Très bien, ne partez pas. La voici, la voilà : la bande dessinée de nos 25 heures de la BD 2016.
(Cliquez pour agrandir si besoin.)

25bd-complet-v2Et voilà ! De la grande philosophie, je vous avais prévenus. Remercions tous en chœur Zia, Goliver ainsi que tous les participants aux 25 heures de la BD qui ont rendu cet événement possible. Pour aller voir les œuvres des autres dessineux (et il y a en a plein, et surtout plein de bien), c’est par ici.

25hbd-merci-ldBon. Après Inktober et ça, on va se reposer un peu, hein. Voilà. Hop.

8 réflexions sur “La banane de la discorde

  1. Génial, comme d’hab ! Et bien joué pour les petites dédicaces à ta communauté facebook sur les tombes !

  2. Je viens par pur hasard de laisser trainer mon pointeur de souris sur le dessin bonus, lisant la description disant, je cite: « Celui qui trouve une logique à ce bousin se verra offrir une bière belge »

    Etant amateur de défis, et de bière, je le relève. (Prends note que la communauté féministe sera mise au courant du fait que tu n’offre des bières qu’a celui, et non celle qui trouvera, salaud patriarcal que tu es.)

    Nous sommes en pleine Savoie , et des vaches paissent paisiblement dans les pâturages. Un girafon (Bébé de la girafe)à été perdu par le cirque itinérant du coin. Il fut recueilli et élevé dans un couvoir local, succursale du poulailler régional. Là il apprit le dialecte de la volaille, et ne put s’exprimer qu’en ces mots : « côt » .
    Un beau matin, le jeune girafon pas tout à fait girafe (culminant seulement à deux mètres au dessus d’un humain normal, alors qu’une girafe adulte en fait au moins 4) Décide de faire comme tout adolescent, il fugue, suivant tout d’abord un papillon.
    Lassé de sa poursuite digne d’un épisode d’alerte cobra, il aperçoit un clown, portant des ballons. Cette vision éveille en lui une nostalgie qu’il ne comprend pas, et il décide de le suivre.

    Arrivés au pied d’une légère butte, nos deux compères (le clown ne s’étant pas aperçu qu’il était suivi par une girafe, d’où son air niais) observe un spectacle touchant. Le jeu d’un père et son fils, tellement démunis qu’ils ne peuvent qu’user d’un parpaing comme jouet.

    Hélas, le père est dans le même cas que les parents du petit poucet, et pour pouvoir nourrir le reste de sa famille, il se doit de sacrifier un de ses enfants. Comme ce n’est pas un lâche, et qu’il ne veut pas prendre le risque que son marmot retrouve malgré tout le chemin de la maison, il compte lui fracasser le crâne à coups de parpaing. (on sent toutefois la douleur de l’acte dans son regard.)

    C’est là qu’intervient le lapin carnivore armé d’une machette, persuadé que le fait de se nourrir d’herbes et de légumes détruit la planète ,et qu’une alimentation sans végétaux est possible ,et saine pour soi et son environnement. Affamé , il guette le papillon qu’avait suivi le girafon, prêt à bondir pour assurer sa subsistance.

    Heureusement, comme dans la chanson, Saint Nicolas était dans le coin, et ne pouvant résister au sauvetage d’un enfant en danger, il échafaude un plan. A l’aide de l’arc que lui a offert (qu’il a volé à) sa dernière victime , il va tirer au ras du lapin pour dévier sa trajectoire, et percer un ballon pour faire du bruit, ce qui surprendra le père, et ralentira son geste, permettant au lapin d’atterrir machette en avant dans la tronche du père, sauvant l’enfant.

    Ce qu’il n’avait pas prévu, c’est que le lapin effrayé pousserait un cri terrible, faisant lâcher le parpaing des mains du père, écrasant la tête du fils. Le lapin vient ensuite planter sa machette dans la tête du père, trop content d’avoir deux bonnes prises de viande, qui lui permettront de nourrir sa famille.

    Saint Nicolas s’en fut, honteux et confus, et jura qu’on ne l’y reprendrait plus.

    (Et la citrouille est là pour dire que ça se passe en novembre, pas plus intéressante que ça dans l’histoire.)

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